Bidonnez-vous :les grands hommes politiques!

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Le dimanche 16 décembre 2007


JEAN-SIMON GAGNÉ:

Le Soleil

Dans leurs autobiographies respectives, les anciens premiers ministres Brian Mulroney et Jean Chrétien déplorent amèrement la mauvaise réputation des politiciens.

«La faute à quelques pommes pourries qui font mal paraître la confrérie, aux électeurs blasés et, surtout, aux damnés journalistes», disent-ils en substance.

Ah, les journalistes! Une bande de vautours, de bons à rien et de scélérats qui ne comprennent pas que sous son épaisse carapace, le politicien est aussi un humain ayant gardé ses rêves d’enfant. Que dis-je, une meute de coyotes incapables d’imaginer que sous son armure de circonstance, le politicien cache une âme généreuse et désintéressée, n’aspirant qu’à contribuer au bonheur de l’Humanité.

Je vois d’ici votre œil humide, cher lecteur. Alors j’observe une courte pause, le temps que vous alliez chercher une bonne provision de mouchoirs.

Ça va? Vous tiendrez le coup? On peut continuer?

Brian Mulroney est sans doute celui qui se désole le plus du cynisme ambiant. «(...) Il en est surgi un climat de méfiance et de soupçon qui empoisonne à tel point nos vies quotidiennes que Mère Teresa elle-même aurait du mal à réussir», peut-on lire dans un passage particulièrement poignant de Mémoires (Éd. de l’Homme, 2007).

Je vous fais grâce du reste, mais c’est pour votre bien. Tout au long de cette brique de 1339 pages, M. Mulroney s’envoie tellement de fleurs qu’il y a un risque élevé de développer une allergie au pollen.

Snif. Emporté par l’émotion, on se prend à rêver d’une grande réconciliation. On se plaît à imaginer un pays de cocagne dans lequel Jean Chrétien, Brian Mulroney, les journalistes, les électeurs et Mgr Ouellet danseraient la farandole, parmi des fontaines de miel ou de guimauve fondue.

Puis, au hasard d’une lecture, on tombe sur l’emploi du temps de messieurs les anciens premiers ministres dans les mois qui ont suivi leur retrait de la vie politique.

Et qu’est-ce qu’on y voit?

En 2004, M. Chrétien a servi de lobbyiste auprès du président du Turkménistan, Saparmurat Niyazov. Grâce aux paroles flatteuses de M. Chrétien, une compagnie canadienne a ainsi obtenu l’exploitation d’un gisement de pétrole et de gaz naturel dans la mer Caspienne. Qui se soucie que M. Niyazov, aujourd’hui décédé, était considéré comme l’un des plus sinistres dictateurs de la planète? Ou que la propriété du gisement était âprement contestée par le pays voisin, l’Azerbaïdjan?

Quant à M. Mulroney, faut-il rappeler les centaines de milliers de dollars en argent comptant reçus pour des activités de lobbying plutôt nébuleuses?

Essayons de résumer les faits. Le matin, vous réclamez davantage de considération pour la classe politique et pour la fonction de premier ministre. Vous éclatez en sanglots en songeant à votre dignité blessée.

L’après-midi, sans le moindre état d’âme, vous accusez réception d’une valise pleine d’argent dans une chambre d’hôtel pour l’établissement d’une usine de bouchons de tubes de dentifrice en Nouvelle-Zélande. Vous n’éprouvez pas de scrupules à utiliser vos contacts au service d’intérêts douteux et à profiter du prestige dont jouit le Canada pour empocher de juteuses commissions.

«Nous n’avons rien fait d’illégal», répètent en chœur les Mulroney et Chrétien de ce monde.

Le pire, c’est qu’ils ont sans doute raison.

S’il y a un Zorro perdu dans ce banc de requins, est-ce qu’il aurait l’obligeance de mettre son masque pour qu’on le reconnaisse?

Après tout ce temps, on ne va pas se laisser sur une note aigre-douce.

Vous connaissez la dernière blague à propos des grandes ambitions du gouvernement Charest en matière de sécurité routière?

On raconte que le Québec et la Grande-Bretagne signeront bientôt une entente pour échanger leur savoir-faire.

En vertu de l’accord, le Québec adopterait progressivement la conduite automobile à gauche, à la manière britannique. Pour commencer, la ministre des Transports, Julie Boulet, commencera l’expérience avec 100 voitures.

Des volontaires?

http://www.cyberpresse.ca/article/20071216/CPSOLEIL/71215082/6553/CPSOLEIL