Je me base sur le mode de scrutin en vigueur et sur l'histoire politique du Québec. À long terme les tiers partis n'ont jamais fonctionné, à moins de remplacer un des deux grands partis (avec pour effet de faire disparaître le parti remplacé).
Par «disparaître» j'entends cesser d'être un parti majeur en mesure de faire élire des députés.
Le mode de scrutin invite les électeurs à «voter contre» plutôt que de «voter pour» un candidat ou un parti, contrairement à un système proportionnel. Pourquoi voter pour un tiers parti alors qu'on a une préférence entre les deux grands partis, et qu'en votant pour l'un on peut contribuer à l'insuccès de l'autre ?
La présence d'un nombre substantiel d'électeurs en faveur d'une option (comme par exemple l'indépendance du Québec) ne garantit pas qu'un parti soutenant cette option aura du succès. Par exemple, lorsque le Parti québécois avait abandonné à toutes fins pratiques l'indépendance au milieu des années 80, cela n'a pas résulté en la création d'un nouveau parti indépendantiste.
Si l'ADQ réussit à se maintenir et à éviter de se désintégrer rapidement (ce qui demeure possible étant donné la croissance très soudaine du parti), il est probable que les électeurs péquistes se rangent derrière l'un ou l'autre des deux autres partis pour bloquer l'autre. Tel électeur péquiste pour cause de nationalisme pourra voter pour l'ADQ afin de rejeter le Parti libéral qu'il jugera trop fédéraliste, et tel autre électeur péquiste, plus porté sur l'idéologie de gauche, pourra voter libéral pour rejeter l'ADQ qu'il jugera trop conservatrice.
Advenant que l'ADQ se désintègre, on retournera simplement au système traditionnel mettant aux prises libéraux et péquistes.
Si on regarde dans les autres provinces et au fédéral, on s'aperçoit que plus souvent qu'autrement les tiers partis vivotent, et que s'ils montent, un autre parti disparaît. Les exceptions sont soit de nature transitoire, ou soit qu'elles impliquent un tiers parti qui est organisé sur la base de certaines régions spécifiques -- le Bloc québécois étant l'exemple le plus évident.
Remarquez bien que je peux me tromper, au risque de sonner comme une publicité de fonds mutuels, le passé n'est pas nécessairement garant de l'avenir. L'Ontario a longtemps eu un système à trois partis compétitifs. Même si les trois partis existent toujours dans cette province, le NPD est maintenant relegué à un rôle de figurant, fort seulement dans le Nord de l'Ontario et certaines autres localités bien précises, et sans aucune chance de prendre le pouvoir.
-- Le couillon anonyme