- mathieugagnon a écrit:
- Bonjour Couillon, je dois t`avouer que j`aimerais beaucoup prendre un café avec toi pour discuter Radio .
Il faudra vous contenter de discuter sur ce forum. Désolé...
- mathieugagnon a écrit:
- J`aimerais énormément connaître ton opinion sur le sujet suivant: Pourquoi Corus a acheté de Métromédia deux stations (stations des deux Pierre ) et ont payés un prix de fou environ 12 millions ?
Métromédia comptait six stations lorsque la compagnie a été vendue à Corus.
Les deux Pierres ont initialement acheté deux stations anglophones en 1988, soit CFCF 600 et CFQR-FM 92,5.
Ils ont ensuite acheté deux stations francophones (CKVL 850 et CKOI-FM 96,9) en 1992.
En principe cette transaction aurait normalement été refusée, puisqu'il était alors interdit pour un propriétaire d'avoir plus d'une station AM et une station FM dans un marché donné; mais les deux Pierres ont réussi à convaincre le CRTC qu'il existait en fait à Montréal deux marchés -- un marché francophone et un marché anglophone. Le précédent a été créé, bien qu'il soit permis de penser que cette interprétation n'aurait pas été acceptée si l'acquéreur avait été une grande compagnie nationale. Mais ça...
En 1999, Métromédia a acheté deux autres stations, soit CIEL-FM 98,5 à Montréal et CIME-FM 103,9 dans les Laurentides. Jean-Pierre Coallier (le propriétaire précédent) venait de lancer, l'été précédent, CJPX-FM à Montréal au 99,5 (l'ancienne fréquence de CIME-FM); il appartient toujours cette station actuellement.
Plus tard durant cette même année (1999), CKVL et CIQC (ex-CFCF) ont été converties en stations de nouvelles continues. L'implantation de ce nouveau format a été synchronisée avec le déménagement de ces stations sur de nouvelles fréquences (690 pour CKVL et 940 pour CIQC), et les deux stations ont obtenu du même coup de nouvelles lettres d'appel (CINF et CINW respectivement).
Ces changements sont probablement directement reliés à la vente à Corus, survenue fin août 2000 (quelques semaines après que CIEL-FM ait adopté un format rock alternatif, devenant du même coup CKOO-FM (Cool FM)). Corus a payé 165 millions de dollars pour les stations, et a accepté en plus de succéder à Métromédia comme débiteur pour une dette de 20 millions.
Quel est le lien au juste entre ces changements et la vente de Métromédia ?Certains ont pensé que les nouvelles fréquences AM donnaient de la valeur à ces stations (et par extension à Métromédia) et que les deux Pierres souhaitaient déjà vendre lorsqu'ils ont demandé ces nouvelles fréquences.
Mais pour obtenir ces nouvelles fréquences, les deux Pierres ont dû adopter un format de nouvelles continues. Un tel format coûte très cher en frais d'opération, et il est de notoriété publique que les deux stations se noyaient dans l'encre rouge -- comme c'est généralement le cas pendant les premières années d'un tel format. Il n'est pas évident que les nouvelles fréquences AM, compte tenu du nouveau format et des pertes qui venaient avec elles, pouvaient réellement améliorer la valeur des stations en question.
Il est donc permis de penser, dans les circonstances, que les deux Pierres avaient très mal évalué l'impact financier de ce nouveau format, et même qu'il était peut-être en voie de ruiner rapidement l'entreprise au complet.
Il faut savoir que les deux Pierres s'étaient fortement endettés pour acquérir leurs quatre premières stations, à un point tel que certains observateurs s'attendaient à l'époque à ce que le CRTC rejette l'achat de CKVL/CKOI par crainte d'une faillite dans le cas où les choses n'iraient pas aussi bien que prévu pour une ou plusieurs de ces stations. Heureusement pour eux, CKOI était en montée au début des années 1990 et a complètement dominé le marché montréalais au cours de cette décennie. CFQR était aussi en très bon état. Quant à leurs stations AM, bien qu'elles n'étaient pas vraiement profitables, elles étaient quand même non-déficitaires.
Un autre point à considérer est que lors de la vente, Corus a pris immédiatement possession de 29,9 % des parts de Métromédia (le maximum permis sans avoir besoin de l'approbation du CRTC). Le transfert du reste des parts a eu lieu suite à l'approbation du CRTC, en janvier 2001. Pourquoi Corus aurait voulu courir le risque d'être pris comme partenaire minoritaire, dans le cas où le CRTC aurait refusé le reste de la transaction ? Ce risque était certes minime. Mais il existait quand même. Serait-ce que l'acquisition immédiate de 29,9 % des parts était nécessaire pour sauver la compagnie ?
Par ailleurs, lors d'une entrevue accordée par Pierre Arcand (juste avant son entrée en politique) à Pascal Beausoleil, Arcand avait affirmé avoir vendu parce que la rumeur voulait qu'Astral soit vendue (à Bell, si je me souviens bien), et qu'il ne pensait pas pouvoir compétitionner contre ce nouveau concurrent.
Arcand aurait pourtant pu se contenter de dire que le prix des stations de radio faisait l'objet d'une bulle (ce qui aurait eu le mérite d'être entièrement vrai), et que pour cette raison c'était là le meilleur moment pour vendre. Par ailleurs je ne vois pas en quoi la vente d'un compétiteur aurait pu au juste empêcher Métromédia de prospérer, d'autant plus qu'Astral était en excellente santé financière.
En sortant cette histoire de rumeur de vente d'Astral, Arcand donne franchement l'impression d'avoir voulu faire diversion. Pourquoi aurait-il pu vouloir choisir d'agir ainsi ?
Jordan Tietolman vous a dit qu'il aurait bien aimé pouvoir apporter des éléments de réponse à votre questionnement, mais qu'il ne pouvait pas le faire :
- Jordan Tietolman a écrit:
- Je voudrais pouvoir parler, mais je ne peux pas
Il faut savoir que la vente de CKVL/CKOI avait été faite pour un montant de 10 millions de dollars, plus 10 % des bénéfices avant impôt de Métromédia sur une période de 10 ans. Pour cette raison, Jack Tietolman (et, suite à son décès au printemps 1995, sa succession) avait un intérêt dans Métromédia, et devait connaître l'état des finances de cette compagnie.
J'ignore la nature exacte du testament de Jack Tietolman, mais il est permis de penser qu'il a laissé ses biens à un ou plusieurs de ses descendants, et que c'est ainsi que Jordan (fils de Paul, et donc petit-fils de Jack) a pu prendre connaissance de certains faits reliés à ce sujet.
Une transaction telle que la vente de CKVL/CKOI à Métromédia s'accompagne généralement de clauses de confidentialité, et en surface c'est là la seule raison qui expliquerait le silence forcé de Jordan. Mais a-t-on déjà vu une telle clause être utilisée pour empêcher de faire connaître des nouvelles positives, ou même neutres, surtout dans le cas où les biens visés par la transaction en question ont été re-vendus à deux reprises depuis ?
- mathieugagnon a écrit:
- Ensuite, ils ont achetés Radiomédia et ils ont payés assez cher le réseau en 2005 ?
Corus n'a rien dépensé. Il s'agissait d'un échange de stations. Astral a reçu quelques stations FM dans des petits marchés : Amqui, Rimouski (2), Drummondville (2) et Saint-Jean-sur-Richelieu.
- mathieugagnon a écrit:
- Par la suite, l`installation des studios neufs a la Place Bonaventure. De gros investissement à ne plus finir...pour en 2011 vendre le réseau Corus à rabais à Cogéco environ 80 millions et ils avaient payés 200 millions Radiomédia je pense ? (Chiffre sur toute réserve)
La vente des stations de Corus Québec (Métromédia plus Radiomédia) à Cogeco a été faite pour 80 millions de dollars. Tel que mentionné plus haut, Radiomédia a été acquis par Corus dans le cadre d'un échange avec Astral.
Jusqu'à un certain point, le contraste entre le prix payé par Corus pour acheter et celui obtenu lors de la vente s'explique par le fait que la bulle du début des années 2000 était chose du passée. Mais cela n'explique pas tout. La mauvaise gestion de Corus à de multiples égards a contribué à cette situation.
- mathieugagnon a écrit:
- Je comprends pas cette mentalité de compagnie..pourtant Corus Entertainment est une compagnie très sérieuse qui oeuvre dans le domaine des médias depuis quelques années.
Corus a toujours eu une réputation d'être une compagnie centralisée au niveau des exigences de profitabilité, mais décentralisée en ce qui concerne les choix de programmation. Leurs exigences en matière de profitabilité immédiate passent pour être particulièrement insatiables, même d'après les standards des compagnies cotées en Bourse.
Il est donc très probable qu'on doive blâmer l'administration locale de Corus au Québec pour ces problèmes (dont notamment Pierre Arcand), en combinaison avec des demandes abusives de profits immédiats de la part de la maison-mère.
- mathieugagnon a écrit:
- Dans l`ouest Canadien les stations de radio vont très bien !! Ils étaient pas des novices dans le domaine ?? Est ce qu ìls ont été mal conseillé sur le marché du Québec ?
Les stations de Corus dans l'ouest vont bien au niveau financier, mais là aussi il y a eu des coupures massives.
Par exemple, Rafe Mair (ex-animateur de CKNW 980 Vancouver, et auparavant ministre dans le gouvernement créditiste de Bennett fils) avait affirmé au sujet de Corus : «Corus knows the price of everything and the value of nothing», et aussi : «I'm not fond, to say the least, of the corporate ownership of CKNW. They inherited one hell of a station, and think it can get along with less and less on the theory that if you feed a horse one less straw a day, pretty soon he'll get along without. In fact neither radio stations nor horses can long survive that way.»
Si la performance de Corus est meilleure dans l'ouest, c'est sans doute parce que les stations achetées dans cette région étaient en meilleur état lors de l'achat.
- mathieugagnon a écrit:
- Pourtant il ya de quoi à faire puisque Cogéco a acheté le réseau Corus. Quelles sont les vraies raisons du départ du Québec de Corus ?? Merci d àvance Couillon
<
Il y a toujours de quoi à faire quand il y a une vente de feu... Surtout quand on peut en profiter pour avoir un monopole à Montréal -- avec tout ce que ça implique au niveau du marché canadien-français dans son ensemble, compte tenu du poids démographique du marché de Montréal.
Corus était tout simplement tanné d'avoir des problèmes au Québec. Ils ont décidé de couper leurs pertes en vendant. Le monopole de Cogeco a été plus facile à faire passer du fait que Cogeco est une compagnie québécoise, et relativement petite par rapport aux grands joueurs nationaux.
Je ne serais pas surpris du tout de voir Corus entrer à nouveau au Québec dans quelques années, si jamais l'occasion se présente (autrement dit : si jamais Corus achète Cogeco ou Astral).
-- Le couillon anonyme